Tyrrell P34 : les 6 roues de l’infortune (2/2)

Ronnie Peterson 1977
Comme son prédécesseur Scheckter, Ronnie Peterson ne s'adaptera jamais au comportement de la P34.
Facebooktwitter

Pari fou de l’ingénieur britannique Derek Gardner, la Tyrrell P34 crée la sensation lors de sa présentation officielle en 1976. Première Formule 1 à six roues de l’histoire, la monoplace adopte un train-avant révolutionnaire censé réduire la surface de résistance à l’air tout en combattant le sous-virage. Victorieuse dès son quatrième Grand Prix en Suède, la belle ne confirmera jamais son potentiel au point de se voir définitivement abandonnée à la fin du championnat 1977.

Confiée au seul Depailler, la P34 effectue des débuts pour le moins prometteur sur le tortueux tracé de Jarama. Stupéfiant 3ème chrono des qualifications, quand dans le même temps l’autre Tyrrell de Scheckter n’a récolté qu’un modeste 14ème temps à plus d’une seconde du chrono du Clermontois, le Français ne convertit pas en course, la faute à une sortie de piste avant même de conclure le premier tiers du Grand Prix. Peu importe, le potentiel est bien là. Longtemps réfractaire, Scheckter réclame désormais lui aussi la P34. Le Sud Africain étrenne avec succès la monoplace britannique à Zolder (Belgique) en décrochant une belle 4ème place, glanant ainsi les premiers points d’une Formule 1 à six roues.

Malgré une très nette tendance à sous-virer, le problème qu’elle était pourtant censée combattre, l’auto britannique confirme sa montée en puissance deux semaines plus tard à Monaco en montant sur les 2ème et 3ème marches du podium aux mains de Scheckter et Depailler. Le meilleur est encore à venir. En pole position à Anderstorp pour la quatrième sortie officielle de la P34, le natif d’East London remporte le lendemain le Grand Prix de Suède devant son coéquipier tricolore, offrant à Tyrrell son tout premier doublé depuis deux ans. Sujet des moqueries lors de son lancement officiel dix mois plus tôt, la F1 à six roues est désormais crainte par ses adversaires au point que certaines écuries, Ferrari et March en tête, envisagent même de développer leur propre modèle en vue de 1977.

Un rêve inachevé

Si plus jamais la P34 ne goûtera à la victoire, elle récoltera six nouvelles deuxièmes places, permettant à Tyrrell de conclure sa saison 1976 au troisième rang du classement constructeur tandis que Scheckter et Depailler terminent respectivement aux 3èmes et 4èmes places du championnat pilote. Bien que probante, cette première année en compétition de l’intrigante monoplace à six roues ne convainc pas le Sud Africain de rester au sein de l’écurie de Ken Tyrrell, Scheckter préférant miser sur la nouvelle équipe Wolf. La suite donnera hélas raison à celui qui prenait un malin plaisir à surnommer la création de Gardner « le tas de ferraille ». Déjà sérieusement handicapée par une vitesse de pointe extrêmement faible et un double système de freinage sujet à moult défaillances, la P34 accuse de nouvelles tares dans sa version 1977.

Rendue beaucoup plus lourde suite au renforcement du châssis opéré par Gardner, la monoplace désormais teinte en bleu et blanc (les couleurs du nouveau sponsor First National City Bank) souffre également du désintéressement de Goodyear, le manufacturier américain refusant de poursuivre le développement des si spécifiques pneus de la P34. Dès ses premiers essais au volant de la version 2-B, Depailler comprend que le rêve de l’ingénieur britannique ne se concrétisera jamais. Une mauvaise répartition des masses et la fragilité du moteur Cosworth entraînent Tyrrell dans une spirale infernale où les désillusions et les abandons s’enchaînent sans discontinuer. Seuls quatre podiums, dont trois du Français et un obtenu par Ronnie Peterson, viendront sauver les apparences dans cette triste saison 1977. Le sort de la première et dernière F1 à six roues de l’histoire est scellé, Tyrrell choisissant de revenir à une monoplace plus conventionnelle en 1978.

Andrea Noviello

Patrick Depailler 1977
Malgré ses efforts, Patrick Depailler finira par déchanter devant les performances de la P34.
Facebooktwitter

Soyez le premier à commenter

Poster un Commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée.


*