Course : Hamilton l’assaut final

Desservi par un premier arrêt au stand trop tardif, Lewis Hamilton s’est joué de son coéquipier Nico Rosberg dans le dernier tour pour remporter le Grand Prix d’Autriche, neuvième manche de la saison de Formule 1. Sorti indemne du nouvel accrochage avec son frère ennemi chez Mercedes, le Britannique conquiert la 46^ème victoire de sa carrière devant la Red Bull de Max Verstappen et la Ferrari rescapée de Kimi Räikkönen.

Lewis Hamilton n’est décidemment pas triple champion du monde pour rien. Là où beaucoup de ses congénères se seraient contentés d’assurer la deuxième place en fin de course afin d’éviter les risques éventuels d’un nouvel accrochage avec son voisin de garage, le Britannique ne s’est pas privé pour aller attaquer son ancien ami d’enfance dans l’ultime tour d’une course qui jusque-là semblait toujours se refuser à lui. Injustement dépossédé de la tête du Grand Prix par son équipe à l’issue de la première valse des changements de pneus, le triple champion du monde avait parfaitement su profiter de son deuxième passage par les box pour revenir dans le sillage de son frère ennemi chez Mercedes. Avantagé par ses gommes tendres, Nico Rosberg ayant monté les pneus super tendres pour son dernier relais, le natif de Stevenage s’est irrémédiablement rapproché de l’autre flèche d’argent avant de porter l’estocade dans l’épingle du virage numéro 2.

Pas décidé à laisser filer une victoire acquise, Rosberg n’a rien trouvé de mieux que de refuser de tourner, accrochant Hamilton et obligeant l’Anglais à sortir loin dans les run-off. Mais contrairement aux deux précédents épisodes de la guerre des étoiles, l’Allemand crevant la roue du champion du monde en titre à Spa avant de le jeter dans l’herbe à Barcelone, le fils de Keke a cette fois été le seul puni par le contact entre les deux monoplaces de la firme à l’étoile en voyant son aileron-avant complètement arraché. Contraint de terminer son Grand Prix au ralenti, le natif de Wiesbaden laisse Hamilton triompher pour la première fois de sa carrière en Autriche et décrocher son troisième succès en 2016. « C’était une course incroyable, révèle le pilote flanqué du numéro 44. Nico a commis une erreur dans le premier virage et j’ai pu tenter l’extérieur au virage suivant. J’ai laissé la place à l’intérieur. J’imagine qu’il a bloqué ses roues et m’a percuté. Je pense qu’il avait un problème avec ses pneus. De toute façon je suis là pour gagner. »

Vettel-Pirelli bis repetita

Qualifié en pole position pour la 54^ème fois de sa carrière, Hamilton réussit une fois n’est pas coutume un très bel envol à l’extinction des feux à l’inverse d’un Nico Hulkenberg totalement resté scotché sur la grille de départ. Déjà opportuniste la veille lors de la séance qualificative, Jenson Button profite de la mise en action poussive de la Force India pour passer le premier virage au 2^ème rang devant la Ferrari de Kimi Räikkönen. Vivement espéré par Hamilton avant la course, le bouchon Button va alors pleinement jouer rôle, le Britannique maintenant le peloton derrière lui pendant sept tours avant qu’ « Ice-Man » ne trouve finalement l’ouverture. Dépassé deux boucles plus tard par l’autre Mercedes de Rosberg, le pilote McLaren recule progressivement dans la hiérarchie, laissant les gros bras en découdre entre eux. Déjà revenu en 3^ème position, l’Allemand s’étant au préalable débarrassé des deux Red Bull et d’Hulkenberg, le fils de Keke accuse alors plus de quatre secondes de retard sur son leader d’équipier, mais sait pouvoir compter sur une stratégie décalée pour pouvoir bousculer l’ordre préétabli.

Craignant une pluie qui ne viendra finalement jamais, Mercedes choisit de scinder la stratégie de ses deux pilotes. Si Rosberg est arrêté dès le 11^ème passage afin de monter les gommes tendres, Hamilton est maintenu en piste avec l’espoir que le ciel autrichien daigne finalement ouvrir ses vannes. Peine perdue. Le Britannique allonge son premier relais jusqu’au 22^ème tour avant de finalement être rappelé par son team. Le triple champion du monde perd, du moins le croit on à ce moment là, ses chances d’accrocher une première fois à son palmarès l’épreuve autrichienne en repartant à la troisième place largement derrière son voisin de garage. Mais en s’arrêtant juste avant le point de rupture de ces toujours autant catastrophiques pneus Pirelli, l’Anglais s’est au moins évité la nouvelle frayeur vécue par l’éphémère leader Sebastian Vettel. Onze mois après son spectaculaire abandon dans l’avant-dernier tour du Grand Prix de Belgique, le quadruple champion du monde est encore frappé par une impressionnante explosion de son pneu arrière (le gauche cette fois) au 27^ème passage.

Les Mercedes encore au clash

Contraint d’immobiliser sa Ferrari en pleine ligne droite des stands, non sans s’être offert une effrayante dérobade du train arrière, le natif d’Heppenheim oblige la direction de course à neutraliser cette neuvième manche de la saison derrière la voiture de sécurité. Trop heureux de voir son retard sur Rosberg annihilé par un concours de circonstance extérieur, Hamilton sait qu’il a alors un coup à jouer, ses gommes accusant onze tours de moins au compteur que celles de son voisin de garage. Épatant depuis l’entame du Grand Prix, Pascal Wehrlein ne peut pas en dire autant. Tombé en dernière position après un deuxième pit-stop en l’espace de dix tours, le protégé de Mercedes se retrouve coincé derrière l’autre pilote Manor Rio Haryanto sans grand espoir de récupérer un rang plus conforme à son magnifique week-end styrien. Il était toutefois écrit que ce Grand Prix d’Autriche si lent à se décanter finirait par réserver quelques surprises en fin de course.

Si Rosberg gère comme souvent parfaitement la relance au 32^ème tour, l’Allemand ne sera plus en mesure de creuser un écart supérieur à deux secondes sur l’autre représentant de la firme à l’étoile. La lutte entre les deux coqs monte en tension au fil des boucles, les deux hommes ne cessant de se piquer le meilleur tour en course au gré de l’allégement de leur monoplace respective. En délicatesse en fin d’épreuve avec des pneumatiques passablement endommagés et des freins à la limite de la rupture, Rosberg commet une erreur fatale dans le dernier tour avec les conséquences que l’on connaît. Un nouveau freinage manqué dans le virage 2 et un accrochage plus tard, le fils de Keke franchit en roue libre et sans aileron-avant le drapeau à damier à une frustrante quatrième position.

Sensationnel Wehrlein

« Je suis dégoûté, affirme le vice-champion en titre. J’avais des difficultés avec les pneus, mais j’étais confiant de pouvoir rester en tête et aller chercher la victoire. Je suis allé un peu loin, mais j’étais à l’intérieur donc c’était à moi de mener ce virage. Cela m’a surpris que Lewis tourne et provoque l’accrochage. » Encore une fois en mesure de dominer à la régulière son très coté équipier Daniel Ricciardo, Max Verstappen tire habillement parti du nouveau clash entre les Mercedes pour empocher le deuxième podium de sa carrière sous le nez de la Ferrari de Räikkönen. Crédité d’un Grand Prix héroïque de bout en bout, Button maximise le potentiel de sa McLaren en décrochant une incroyable sixième place à l’arrivée devant le non moins impressionnant Romain Grosjean. Bon dernier à la mi-course, Wehrlein est quant à lui parvenu à faire magnifiquement fructifier sa stratégie décalée en offrant à Manor le point de la dixième place.

Insatiable chasseur de victoire, Lewis Hamilton décroche à la force du poignet son tout premier succès en terre autrichienne, le 46^ème de sa carrière en Formule 1, et fait par la même occasion taire les critiques qui avaient empoisonné son très fade week-end azerbaïdjanais. Vainqueur pour la troisième fois en quatre courses, le triple champion du monde frappe un grand coup dans le duel interne qui l’oppose à Rosberg chez Mercedes et se replace à onze longueurs de son coéquipier avant de se rendre sur ses terres de Silverstone où il bénéficiera, cette fois, du soutien indéfectible du public.

Andrea Noviello