Largement dominé par son coéquipier pendant 64 tours, Nico Rosberg a profité d’une bévue stratégique de Mercedes pour gagner le Grand Prix de Monaco, sixième étape de la saison de Formule 1. Victorieux une troisième fois d’affilée dans les rues de la Principauté, l’Allemand termine devant Sebastian Vettel sur Ferrari et Lewis Hamilton sur l’autre flèche d’argent.
Fou de joie samedi après-midi après avoir décroché avec la manière sa toute première pole position dans les rues de la Principauté, Lewis Hamilton avait lâché en conférence de presse une phrase à la résonnance prémonitoire. « Je n’ai même pas effectué la moitié du boulot. Il y a beaucoup de choses à faire demain. Le chemin est long, car les tours sont très nombreux ici. La course est encore loin d’être gagnée. » Le Britannique ne croyait pas si bien dire. Parfait en tout point lors des qualifications, le double champion du monde a également surclassé ses adversaires en course ne laissant jamais à son coéquipier Nico Rosberg le moindre espoir de s’approcher de l’aileron arrière de sa flèche d’argent.
Pourtant, alors qu’il se dirigeait vers un deuxième succès incontestable dans les rues monégasques, le spectaculaire accrochage entre Max Verstappen et Romain Grosjean, conjugué à la nouvelle bourde stratégique de son équipe Mercedes, allait ruiner une heure vingt-cinq d’une éclatante démonstration. Propulsé en tête de la course à la faveur du deuxième arrêt au stand du natif de Stevenage, Rosberg s’en va chercher sa troisième victoire consécutive à Monaco et rejoint au palmarès les immenses Graham Hill, Alain Prost ou Ayrton Senna. « Je suis super content, avoue le vice-champion du monde 2014. Mais je sais aussi que j’ai eu beaucoup de chance aujourd’hui. Lewis a brillement piloté et il aurait également mérité de l’emporter. Cela s’est passé comme ça, c’est la course. »
Alonso poissard
Installé en pole position pour la 43ème fois de sa carrière, Hamilton s’envole parfaitement à l’extinction des feux et vire en tête dans le goulot de Sainte-Dévote. Placé à ses côtés sur la grille, Rosberg parvient à conserver sa deuxième place en dépit d’une attaque de Sebastian Vettel au premier virage. Mieux parti que son coéquipier Daniel Ricciardo au départ, Daniil Kvyat emmène le groupe de chasse devant l’autre Red Bull de l’Australien et la deuxième Ferrari de Kimi Räikkönen. Toujours agité à Monaco, le premier tour va coûter un aileron avant aux malheureux Nico Hulkenberg, poussé involontairement dans le rail par Fernando Alonso à Mirabeau, et Felipe Massa, victime d’un contact avec la Lotus de Pastor Maldonado. Sans doute affectée par la touchette avec le Brésilien, le monoplace noir et or du Vénézuélien renonce dès l’entame du 7ème passage après avoir dû céder à l’attaque de Max Verstappen le tour précédent.
Grandes bénéficiaires de ces premières boucles mouvementées, les McLaren de Jenson Button et de Fernando Alonso pointent tous les deux dans les points aux 9ème et 10ème positions. Confortablement installé au commandement, Hamilton possède déjà plus de trois secondes d’avance sur son dauphin Rosberg au 11ème passage. Incapable de se rapprocher de la flèche d’argent de son coéquipier, l’Allemand voit même son compatriote Vettel fondre sur lui au moment où les leaders affrontent les dépassements des premiers retardataires au 18ème tour. Bien que jamais distancé par Rosberg, Sebastian Vettel sait que sans un coup stratégique il n’aura aucune chance de venir à bout du double lauréat monégasque en piste. Appelé à son box à la fin du 36ème passage, le pilote Ferrari tente l’« underkut », mais va se contrer à la réactivité de l’écurie championne en titre.
Verstappen débuts fracassants
Consciente du danger, Mercedes rappelle Rosberg la boucle suivante et permet à son pilote de conserver le 2ème rang derrière l’intouchable leader Hamilton. Grand perdant de cette première valse des ravitaillements, Max Verstappen reste immobilisé 31 secondes à son stand en raison d’un problème de fixation de ses deux roues arrière et chute à la 13ème place. Propulsé à une improbable 9ème position, lui qui s’élançait pourtant 13ème sur la grille, Fernando Alonso est contraint à l’abandon au 43ème tour sur rupture de sa boîte de vitesse. Remonté dans les échappements du 11ème Valtteri Bottas, après avoir notamment pris le meilleur sur son coéquipier Sainz, Max Verstappen choisit de modifier sa stratégie afin de ne plus buter plusieurs tours durant sur la Williams du Finlandais.
De retour à son box au 48ème passage, le fils de Jos choisit de monter les gommes super tendres. Un pari osé, mais qui s’avérera payant. Beaucoup plus rapide que ses adversaires directs, le pilote Toro Rosso revient comme une balle sur son voisin de garage Sainz. Rusé comme un vieux briscard, le débutant hollandais profite du dépassement de Vettel sur son coéquipier et Valtteri Bottas pour lui emboîter le pas et grimper de deux places. Galvanisé par ces deux coups de maître, Verstappen ramarre Romain Grosjean en seulement quelques tours, mais sera victime de sa fouge. Trop près de la Lotus du Français à l’entame de la 64ème boucle, le natif d’Hasselt manque totalement son freinage et vient violemment harponner la monoplace du Tricolore. Si Grosjean pourra repartir, non sans avoir perdu dans l’accrochage deux places et tout espoir d’inscrire des points, Verstappen doit mettre pied à terre, obligeant l’intervention en piste de la voiture de sécurité. Celle qui causera la perte de l’inébranlable leader Lewis Hamilton.
La bourde de Mercedes
Trompée par les calculs erronés de ses superordinateurs, Mercedes rappelle au stand l’Anglais chausser des pneus super tendres le tour suivant croyant, à tort, posséder une avance suffisante sur l’autre flèche d’argent de Rosberg. Sensiblement ralenti par la safety-car dans le deuxième secteur, Hamilton perdra même la 2ème place au profit de Vettel et devra, le mort dans l’âme, se contenter d’une bien fade 3ème position lui qui avait éclaboussé cette course de toute sa classe. « Je n’ai pas de mot pour décrire ce que je ressens actuellement, déclare laconiquement l’ancien pilote McLaren. J’ai fait confiance au team. On gagne ensemble, on perd ensemble. Je me sentais tellement bien aujourd’hui. J’adore cette course et je crois que je n’ai jamais eu un tel rythme. Je ne faisais aucun effort pour creuser l’écart. Ce ne fut pas une course facile pour moi, mais une chose est sûre : je reviendrai ici l’an prochain pour gagner ce Grand Prix. »
Heureux vainqueur d’une course qu’il aura longtemps passé loin derrière Hamilton, Nico Rosberg empoche en Principauté son deuxième succès consécutif de la saison, le troisième d’affilé à Monaco. De nouveau sur une pente ascendante après avoir énormément souffert en début d’année, le vice-champion du monde 2014 se replace dans l’aspiration du Britannique au championnat, l’Allemand revenant à dix longueurs de son rival au classement, et assène un sérieux coup au moral d’un Hamilton que l’on croyait indestructible il y a encore un mois à Bahreïn.
Andrea Noviello
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