Emanuele Pirro : « Les courses doivent redevenir un sport d’homme » (2/2)

Emanuele Pirro
Emanuele Pirro pense que la F1 doit baisser ses prix pour attirer le public sur les circuits.
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Reconverti commissaire-pilote auprès de la FIA depuis 2010, Emanuele Pirro suit toujours avec attention l’évolution de la Formule 1. Si celui qui officiait en tant que marshal lors du dernier Grand Prix de Hongrie juge certaines critiques des fans trop sévères, l’homme aux 37 Grand Prix aimerait que les courses redeviennent plus sélectives. Bien que satisfait du spectacle proposé cette année, l’ancien pilote Dallara appelle la catégorie reine à retrouver ses fondamentaux.

Vous aviez l’habitude à votre époque de courir quelque soit les conditions climatiques. Aujourd’hui, la course est constamment neutralisée derrière la voiture de sécurité ou carrément stoppée sous drapeau rouge à la moindre averse. N’est-ce pas exagéré ? Ne doit-on pas revoir les règles pour permettre aux pilotes de rouler même en cas de fortes pluies ?

J’ai, durant ma carrière, participé à deux courses folles sous la pluie à Adelaïde en 1989 et 1991. La pluie était tellement forte que c’en était inconduisible. Il y a des fois où il faut savoir dire non, pas uniquement pour le tenue de route, mais aussi pour la visibilité. Le problème est que de nos jours le système n’est pas prêt à accepter même le plus petit accident s’il peut être évité. À l’époque les courses étaient dangereuses et s’il y avait un accident c’était presque normal. Dorénavant, on veut toujours être très précautionneux, mais parfois on se montre peut être un peu trop prudent. Après, il faut conduire une voiture de course pour comprendre le problème de visibilité imposé par un Grand prix couru sous la pluie.

Adrian Newey a clairement dénoncé le manque de liberté technique offerte aux ingénieurs comme étant la principale raison de son départ partiel de la Formule 1. La F1 ne devrait-elle pas s’inspirer de l’Endurance où la réglementation technique est nettement moins cadenassée ?

Les personnes qui écrivent les règlements sont très compétentes et les écuries sont toujours impliquées dans l’élaboration de la future règlementation. Je trouve personnellement le règlement du Mans très bien fait. Mais parfois, il faut élaborer un règlement en fonction de nombreux paramètres et sans engendrer trop de frais. Tout le monde essaye de construire les voitures les plus rapides possible. Après, la vitesse des voitures n’a rien à voir avec le spectacle proposé. Les courses des années 60-70 étaient exceptionnelles alors que les voitures étaient très lentes dans les virages. Je comprends le point de vue d’Adrian, car c’est quelqu’un qui a toujours des idées novatrices. Je conçois qu’il aimerait jouir d’une totale liberté afin d’exprimer tout son talent et non pas ressentir la frustration de ne pas être capable d’utiliser à bien toutes ses idées.

« Même si les écuries reçoivent moins d’argent, il est très important de voir du monde autour des circuits. Certaines personnes voudraient assister à un Grand Prix, mais ne peuvent tout simplement pas se le permettre »

Dans ce cas, comment peut-on assouplir les contraintes imposées aux ingénieurs ?

Il faut encore une fois d’avantage penser au public. Les courses doivent redevenir un sport d’homme plutôt qu’un sport de technique. J’aimerais revoir des grands pneus comme à l’époque, moins d’aérodynamique et des voitures plus jolies. Je pense que la puissance actuelle des propulseurs est suffisante. La puissance est importante en fonction de la tenue de route. Moitié puissance et moitié tenue de route serait le compromis idéal pour assurer un bon spectacle. J’aimerais aussi voir des voitures plus difficiles à conduire, des voitures qui pardonnent moins et qui doivent d’avantage être respectées par le pilote. Ainsi, on aurait des courses un peu plus sélectives.

Le fiasco populaire des tracés exotiques et la désertion des tribunes sur les circuits historiques doivent-ils pousser la F1 à revoir de fond en comble sa politique tarifaire pour inciter le public à revenir assister aux Grand Prix ? L’engouement entrevu à Silverstone cette année prouve que les fans répondent présents si les places sont moins chères

L’Angleterre fut une course vraiment fantastique. Il y avait une ambiance très spéciale et une vraie ferveur de la part du public. C’était réfléchi sur les pilotes, sur les émotions et tout le monde était content. C’est un signal très important. Les prix sont très chers aujourd’hui. Le système a plus été construit en fonction de la télévision que de celui du public. Même si les écuries reçoivent moins d’argent, il est très important de voir du monde autour des circuits. Certaines personnes voudraient assister à un Grand Prix, mais ne peuvent tout simplement pas se le permettre. Et si le public ne peut pas payer les places, il faut trouver un moyen de baisser le prix des billets parce qu’il est obligatoire d’avoir un public satisfait.

Propos recueillis par Andrea Noviello

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