Emanuele Pirro : « Les pilotes et les commissaires se complètent » (2/2)

Emanuele Pirro Sportel Monaco
Emanuele Pirro estime que la F1 doit d'avantage penser à son public.
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Auteur d’un passage furtif en Formule 1, Emanuele Pirro a toutefois gardé un pied dans l’univers des Grand Prix. Convié à assister au 25ème anniversaire du Sportel Monaco, le salon international du sport et des médias, l’ancien pilote Benetton décortique son rôle de commissaire-pilote et explique les raisons de la complexification à outrance des règlements en F1.

Comment jugez-vous concrètement un fait de course placé sous investigation ?

Le pilote commissaire a un grand poids, mais à la fin on est quatre et la décision est prise quand on a tous les quatre rejoint le même avis. On ne part pas toujours avec la même opinion autour d’un incident de course parce qu’on voit les choses d’un point de vue différent. Mais si celui qui a le point de vue le plus juste est capable de l’expliquer aux autres personnes, elles vont finir par abonder dans son sens. Il n’y a presque jamais de désaccord total au moment de rendre une décision. Cela marche bien, mais il ne faut jamais oublier que les commissaires de course ne sont pas les gens qui établissent les règles. Ce ne sont pas non plus des gens qui donnent des sanctions de façon arbitraire et comme ils le veulent. Ils sont uniquement là pour faire respecter un règlement qui est écrit par quelqu’un d’autre. Les commissaires peuvent seulement juger, grâce à leur expérience, si un incident particulier a enfreint ou pas le règlement.

Drive-trough, stop and go de 10 secondes, rétrogradation de 5 places, rétrogradation de 10 places, stop and go de 5 secondes, pénalité de 20 secondes sur le temps final, permis à points … Ne devrait-on pas simplifier tout le modèle de sanction et revenir à quelque chose de plus lisible pour les fans ?

Comme on l’a évoqué tout à l’heure, faire des choses en fonction du public rentre de temps en temps en conflit avec les règles instaurées pour rendre les courses à la fois plus sûres et plus justes. La dernière pénalité en date (les 5 secondes de pénalité) a été fortement souhaitée par nous tous, car dans certaines situations les infractions ne sont pas assez graves pour mériter un drive-trough. Un drive-trough élimine quasiment un pilote de la course, mais on ne pouvait pas pour autant laisser passer une infraction aussi minime soit-elle. Les 5 secondes de pénalité lors du changement de pneus me semblent ainsi être un bon compromis pour un pilote ayant commis une faute pas trop grave. Les gens veulent du spectacle, mais il ne faut pas omettre le fait que les règles ont été élaborées afin de rendre le sport le plus juste possible.

« Les pénalités financières ne sont pas une bonne chose, car certaines équipes se foutent de l’argent. Une sanction financière aura un impact différent selon qu’elle soit infligée à un top team ou à une écurie de fond de grille. On s’est rendu compte que cela ne fonctionnait pas. Je pense qu’à la fin seul le pilote doit payer dans ce cas là »

On a pourtant l’impression que les sanctions infligées aux pilotes sont souvent injustes …

Si on pense au football, les penalties ne rendent pas les choses moins spectaculaires. C’est un peu la même chose en F1. Plus de pénalités et plus de contrôles peuvent engendrer un spectacle de moindre qualité. Il est néanmoins crucial de garantir et d’assurer une certaine justice, car beaucoup d’argent est en jeu aujourd’hui. On ne peut pas se permettre d’influencer un résultat par un mauvais jugement ou alors par un manque de jugement sur une situation litigieuse. Je suis d’accord que, parfois, la perfection voulue par ceux qui courent rentre en conflit avec celle perçue par les fans. Il faut peut être réfléchir sur ce point et se montrer un peu moins exigeant. Les personnes qui courent doivent d’avantage penser aux personnes qui les regardent.

De nombreux pilotes ont  été pénalisés ces deux dernières saisons pour un unsafe-release alors qu’ils n’en sont en rien responsable. Pourquoi ne pas pénaliser l’équipe plutôt que le pilote ?

Je ne suis pas d’accord. L’équipe et le pilote font un tout. Si l’équipe commet une erreur en ne préparant pas bien la voiture ou n’adaptant pas le bon set-up, c’est le pilote qui va en souffrir. La qualité du travail de l’équipe influence directement la performance du pilote et son résultat. Les pilotes sont dans les mains de l’équipe et c’est dans cette optique là que si l’équipe commet une faute, on ne peut pas pénaliser l’équipe. Le pilote n’est pas l’unique responsable lorsqu’il gagne ou perd une course. C’est toute une équipe qui construit, dessine, prépare et essaye de la meilleure des façons une voiture avant que le pilote ne la conduise à son tour du mieux possible.

Infliger des pénalités financières aux équipes fautives ne serait-il pas plus juste ?

Les pénalités financières ne sont pas une bonne chose, car certaines équipes se foutent de l’argent. Une sanction financière aura un impact différent selon qu’elle soit infligée à un top team ou à une écurie de fond de grille. On s’est rendu compte que cela ne fonctionnait pas. Je pense qu’à la fin seul le pilote doit payer dans ce cas là. C’est triste, mais si un mécanicien n’attache pas bien une roue, si un ingénieur ne choisit pas le bon set-up de la voiture ou si un mécanicien oublie un branchement, au final c’est toujours le pilote qui va s’arrêter. Je pense ainsi que c’est une juste façon de procéder.

Propos recueillis par Andrea Noviello

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