Destiné à relancer une économie locale en berne, l’Autodrome Enzo et Dino Ferrari voit le jour le 25 avril 1953 grâce à l’association de quatre entrepreneurs italiens. Basé à 30 km à l’est de Bologne, le circuit niché dans le parc d’Imola offre des virages extrêmement rapides et un joli vallonnement. Intégré au calendrier de la Formule 1 en 1980, le tracé italien va très vite devenir un rendez-vous immanquable en dépit de son caractère dangereux. Meurtri à jamais par les accidents mortels de Roland Ratzenberg et d’Ayrton Senna lors du maudit week-end 1994, Imola conservera la catégorie reine jusqu’en 2006 avant de définitivement baisser le rideau.
Très exigeant pour les moteurs, le circuit d’Imola couronne Nelson Piquet cette année là lors d’une première course marquée par la terrible sortie de piste de Gilles Villeneuve dans la courbe qui portera, quelques années plus tard, son nom. Mais il était écrit que le sort du « petit prince » serait lié à jamais à Imola. Deux ans plus tard, le Québécois et son coéquipier Didier Pironi sont propulsés en tête par l’abandon de la Renault de René Arnoux. Désertée par les équipes britanniques qui entendent ainsi protester contre les disqualifications de Nelson Piquet et de Keke Rosberg du Grand Prix du Brésil, la course ne peut échapper aux pilotes Ferrari. S’ils ont convenu de ne plus s’attaquer en fin de course, le Français ignore le pacte moral passé avec son coéquipier et subtilise, en dépit des consignes de la Scuderia, la victoire à Villeneuve dans le dernier tour de course. Fou de rage devant la « trahison » de celui qu’il considérait comme un ami, le bouillant canadien périra deux semaines plus tard à Zolder en tentant de dépasser la March de Jochen Mass lors des qualifications.
Extrêmement demandeur en terme de consommation, le circuit romagnol va offrir d’autres finaux ébouriffants comme lors de l’édition 1985 qui verra tour à tour Senna, Johansson et Piquet abandonner à trois tours du but sur panne sèche et offrir la victoire à Alain Prost finalement déclassé pour poids non conforme au profit d’Elio di Angelis. Le « professeur » tiendra néanmoins sa revanche l’année suivante en remportant une course marquée par quatre nouveaux abondons provoqués par une panne d’essence, passant lui-même tout près de la pénurie. Légèrement retouché au niveau de la Variante Alta en 1986, Imola passe tout près de la catastrophe un an plus tard avec l’effroyable accident de Nelson Piquet dans Tamburello. Si toute la partie gauche de la Williams est détruite, le natif de Rio de Janeiro s’en tire avec une commotion cérébrale et une cheville chiffonnée.
Week-end maudit
Renommé Autrodomo Enzo et Dino Ferrari suite à la mort du « Commendatore » en 1988, Imola évite un nouveau drame l’année suivante. Quatrième d’une course menée par Senna, Gerhard Berger frôle la mort après un épouvantable crash dans ce même virage de Tamburello. Victime de l’embrasement de sa monoplace, l’Autrichien doit son salut à la promptitude des commissaires de piste d’Imola. Souffrant de brulures au second degré aux mains et de quelques côtes cassées, l’homme aux 210 Grand Prix manquera la manche suivante à Monaco avant de reprendre la compétition, non sans y avoir laissé une partie de son insouciance au volant. Relancée par un nouveau départ, la course sera marquée par une nouvelle trahison entre équipier. Sept ans après l’épisode Villeneuve-Pironi, Ayrton Senna rompt le pacte de « non agression » décrété avec son coéquipier Alain Prost en dépassant le Français dans le premier tour de course. Senna facile vainqueur, la relation entre les deux hommes s’en trouve définitivement altérée.
Marqué par son terrible accident dans Tamburello, Berger va tenter de faire reculer le mur de protection afin d’offrir une zone de dégagement plus conséquente aux pilotes en cas de sortie de piste. En vain. L’appui de Senna n’y changera rien. La présence du fleuve Santorno empêchera toute action de sécurisation et conduira Imola à sa funeste destinée. Si Rubens Barrichello échappe miraculeusement à la mort le vendredi après son effrayante cambriole dans la Variante Bassa, Roland Ratzenberger et Ayrton Senna n’ont pas cette veine. Victimes respectivement d’une rupture de son aileron avant et de sa colonne de direction, l’Autrichien et le triple champion du monde brésilien vont trouver la mort en direct à la suite d’effroyables accidents dans les virages Villeneuve et Tamburello. Épargnée depuis 1986 et le décès d’Elio De Angelis au Paul Ricard, la Formule 1 perd coup sur coup deux de ses représentants dont son emblème la plus célèbre.
Totalement abasourdie par cette double disparition, la catégorie reine opère alors une vitale remise en question de ses standards de sécurité. Imola n’y échappe pas. Deux chicanes sont installées dans les virages Tamburello et Villeneuve, quand celle d’Acque Minerale est supprimée, et la Variante Bassa passe d’une double chicane à une seule. Profondément dénaturé et castré, le tracé italien voit Heinz-Harald Frentzen et Ralf Schumacher y signer la première victoire de leur carrière en 1997 et 2001. Chasse gardé des Schumacher entre 1999 et 2004 (une pour Ralf, cinq pour Michael), Imola sacrera le prodige d’Oviedo, Fernando Alonso, en 2005 au terme d’un duel d’anthologie avec sa majesté Schumacher. Vainqueur de la dernière édition en 2006, le septuple champion du monde allemand rendra la monnaie de sa pièce à l’Espagnol en résistant à son tour aux attaques incessantes du pilote Renault. Las de la désuétude des infrastructures du circuit et du manque d’investissement de ses propriétaires, la FIA abandonne Imola fin 2006 après 27 ans de vie commune. Et tourne définitivement la page de celui qui fut jusqu’à l’accident de Bianchi l’an dernier son dernier terrain de jeu meurtrier.
Andrea Noviello
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