Les circuits mythiques : Kyalami (2/2)

Niki Lauda Afrique du Sud 1984
Niki Lauda reste le roi incontesté de Kyalami avec trois succès en 1976, 1977 et 1984.
Facebooktwitter

Aménagé sur un plateau situé à 1500 mètres d’altitude, le circuit de Kyalami est inauguré le 4 novembre 1961. Basé à 20 km de Johannesburg, le tracé sud africain reçoit sa première course de Formule 1 en 1967 et se pose immédiatement comme l’un des plus rapides du calendrier. Mais les disparitions tragiques de Revson et Pryce conjuguées à la politique d’apartheid menée par le gouvernement auront finalement raison du rendez-vous le plus exotique du championnat.

Si tout le peloton parvient à éviter les deux voitures en travers, Clay Regazzoni n’a pas cette chance et percute de plein fouet la Surtees de l’Anglais. Prisonnier dans l’incendie de sa BRM, le Suisse doit son salut à l’héroïsme et au courage du Britannique, ce dernier n’hésitant pas à braver les flammes pour sauver l’ancien pilote Ferrari. Victime d’une rupture de suspension sur sa Shadow lors d’essais privés disputés une semaine avant l’édition 1974, Peter Revson n’aura pas la même veine. Sorti de la piste au virage Barbecue, l’Américain vient se fracasser contre les barrières de sécurité. Totalement démantibulée dans le crash, la voiture du pilote de 35 ans prend instantanément feu et scelle le sort de celui qui s’apprêtait à disputer le 31ème Grand Prix de sa jeune carrière. Le brillant succès de l’enfant du pays Jody Scheckter l’année suivante ou la première des trois victoires de Niki Lauda sur le sol africain en 1976 (l’Autrichien remportant également les éditions 1977 et 1984) à la suite d’un somptueux duel avec son rival James Hunt ne parviendront pas réellement à effacer ce douloureux souvenir.

Pire, Kyalami est de nouveau frappé par une tragédie en 1977. Obligé de stopper sa Shadow sur les bas côté de la ligne droite des stands en raison d’une conduite d’essence défaillante, Renzo Zorzi va être l’instigateur malheureux du décès de son coéquipier Tom Pryce. Désireux de stopper les flammes jaillissant de la monoplace de l’Italien, deux commissaires de piste traversent inconsciemment la piste sans prêter attention à l’arrivée des autres voitures. Si le premier parvient à rejoindre l’autre partie de la ligne droite des stands, son acolyte, Frederik Jensen van Vuuren, est moins chanceux et se voit cruellement faucher par l’autre Shadow de Tom Pryce. L’homme de 19 ans est tué sur le coup tout comme le pilote gallois frappé à la tête par l’extincteur du commissaire. Le monde de la F1 est sous le choc. Pourtant, la catégorie reine n’abandonne pas son escale sud africaine.

Boycott et lutte de pouvoir

Autrement plus réjouissante, l’édition 1978 sacre le Suédois Ronnie Peterson au terme d’un Grand Prix au scénario complètement fou où le jeune Riccardo Patrese se révèle au volant de la modeste Arrows avant que la casse de son moteur Ford ne le prive d’une victoire amplement méritée. En 1981, la guerre entre la FISA (Fédération Internationale du Sport Automobile) et la FOCA (Formula One Constructors Association) est à son comble et conduit à la désertion des équipes légalistes. L’épreuve, amputée notamment de Ferrari, consacre l’Argentin Carlos Reutemann sur Williams. Un an plus tard le week-end sud africain est une nouvelle fois perturbée par des clivages entre l’alliance FISA-FOCA et les pilotes. Refusant de s’astreindre aux règles de la super-licence, ces derniers décident de boycotter l’épreuve. Réunis au Sunnyside Park Hotel de Johannesburg, les Mansell, Patrese, Lauda et autres Villeneuve font front tous ensembles.

Après une nuit collective passée dans des sacs de couchages, les pilotes emmenés par leur représentant Didier Pironi reprennent les négociations au petit matin et obtiennent finalement gain de cause. La course est remportée cette année là par Prost qui confirme ainsi l’hégémonie du moteur turbo sur le moteur atmosphérique en terre sud africaine. En lice pour la couronne mondiale en 1983 face à Nelson Piquet, le pilote français perd de nouveau le titre sur ko technique, son V6 Turbo rendant l’âme peu avant la moitié de l’épreuve. Bon joueur, Renault ne portera jamais réclamation contre Brabham en dépit de l’utilisation d’une essence illégale. Après avoir accueilli la Formule 1 à 18 reprises, le grand Kyalami est abandonné en 1985 par la catégorie reine en raison de la politique d’apartheid menée par le gouvernement. Le dernier Grand Prix sur l’ancienne version du tracé voit Nigel Mansell s’imposer dans un climat singulier, de nombreuses télévisions ayant boycotté l’événement afin de dénoncer la politique du gouvernement sud africain.

De retour au calendrier du championnat du monde en 1992, soit deux ans après la libération de Nelson Mandela, le Grand Prix d’Afrique du Sud se dispute toujours à Kyalami, mais sur un tracé profondément remanié. Tout le charme de la configuration d’origine est bafoué au profit d’un tracé lent et sinueux qui inaugurera la longue domination des Williams-Renault sur la F1. (Victoire de Mansell en 1992 et de Prost en 1993). La faillite du promoteur et la volonté de Bernie Ecclestone d’exporter son bébé vers de nouvelles contrées conduiront finalement à son abandon définitif. La page africaine de la Formule 1 se tourne pour de bon et embarque avec elle l’âge d’or de la catégorie pinacle du sport automobile. Kyalami, « ma maison » en Swahili (langue bantoue de l’Afrique de l’Est), est laissé à l’abandon. Le site ne reprendra vie qu’avec la création d’une banlieue résidentielle et d’un centre commercial en lieu et place de l’ancien tracé. Le bruit étourdissant des F1 en moins.

Andrea Noviello

Senna Prost Schumacher Kyalami 1993
Sorti vainqueur de son épique duel avec Senna,  Alain Prost remporte la dernière édition en 1993.
Facebooktwitter

Soyez le premier à commenter

Poster un Commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée.


*