En ballottage défavorable après son revers luxembourgeois, Michael Schumacher doit impérativement l’emporter pour espérer conquérir le titre lors du Grand Prix du Japon 1998. Malheureusement, un calage au départ et une crevaison dans le 31ème tour viennent brutalement mettre fin à ses rêves de troisième sacre mondial.
Rouge de bonheur au soir de son succès à Monza, Michael Schumacher n’a pourtant pas pavoisé bien longtemps avant de se remettre au travail. L’Allemand le sait mieux que quiconque : rien n’est jamais acquis en Formule 1. Si les efforts acharnés du pilote Ferrari ont permis à la Scuderia de combler la quasi-totalité du déficit de performance qu’elle accusait sur sa rivale McLaren-Mercedes en début de saison, ils n’ont toutefois été d’aucun secours au « Kaiser » lors d’un Grand Prix du Luxembourg qui l’aura vu perdre un duel de titan face à Mika Hakkinen. Rabaissé à un ingrat rôle d’outsider dans la course au titre, « Schumi » devant désormais reprendre cinq points au Finlandais pour espérer coiffer la couronne mondiale au Japon, le protégé de Willi Weber s’est comme toujours réfugié dans le travail pour tenter de contredire les pronostics. Fidèle à sa réputation de véritable stakhanoviste, le fer de lance de la Scuderia a multiplié les séances d’essais privés pendant les cinq semaines qui ont séparé le rendez-vous luxembourgeois de la manche nippone.
En tout le « Baron Rouge » aura cumulé des milliers de kilomètres et répété tous les scénarios possibles sur les pistes de Ferrari à Fiorano et au Mugello. Résolument confiant lors de son arrivée sur le juge de paix de Suzuka, l’ancien poulain de Flavio Briatore affiche ouvertement ses ambitions dès la séance qualificative. Non content de signer sa troisième pole position consécutive depuis Monza et de coller quasiment deux secondes à son coéquipier Eddie Irvine, le prodigue de Kerpen a surtout remporté une première bataille psychologique face à un Hakkinen vierge de toute expérience en matière de lutte finale pour le titre suprême. Pourtant, là où tout le monde s’attend à voir le Finlandais succomber au poids de l’enjeu, c’est au contraire le « petit Mozart de la F1 » qui va craquer sous la pression. Fragilisé par l’avortement de la première procédure de départ (suite au calage de Jarno Trulli) et par l’attente que lui a fait endurer Hakkinen, le champion du monde 1995 cale à son tour lors de la seconde mise à feu, ruinant ainsi tous les plans imaginés par l’écurie la plus titrée de l’histoire.
Un dénouement au goût amer
Rétrogradé sur la dernière place de la grille, Schumacher est d’ores et déjà condamné à une course-poursuite dont l’issue paraît écrite. Bien que dépité par ce coup du sort, la coqueluche de Maranello ne se démobilise pas et s’évertue au contraire à prendre le meilleur envol possible. Sa mise en action est digne d’un pilote de dragster puisque le natif d’Hürt-Hermülheim efface cinq adversaires avant même d’aborder le premier virage. Transcendé par cette entame de rêve, le pilote de 29 ans dépasse dans la foulée quatre autres voitures et conclut le 1er tour de course en douzième position. Décidé à ne pas traîner en route, le double champion du monde s’offre ensuite le scalp d’Alesi, Fisichella, Wurz et de son frère Ralf en l’espace de quatre boucles avant de buter sur l’autre Jordan de son ancien ennemi Damon Hill. L’Anglais n’étant clairement pas disposé à faciliter la tâche à celui qui n’a pas hésité à le sortir pour conquérir sa première couronne mondiale, « Schumi » reste coincé près de dix tours durant à la septième place.
Finalement débarrassé du fils de Graham au 14ème passage, le champion du monde 1996 stoppant à son box effectuer son arrêt-ravitaillement, le pilote Ferrari peut enfin poursuivre son irrésistible remontée vers l’avant du peloton. Facilement venu à bout d’un nettement plus docile Jacques Villeneuve, le protégé de Willi Weber exécute son pit-stop deux boucles plus tard et reprend la piste derrière la Williams du Canadien. Si l’écart le séparant de l’intraitable leader Hakkinen semble rédhibitoire, le pilote McLaren évoluant près de 27 secondes devant la Ferrari frappée du numéro 3, le « Kaiser » s’échine à maintenir sous pression le Finlandais jusqu’à un événement inattendu vienne définitivement mettre un terme à ses rêves de sacre. Bloqué en dernière position depuis l’extinction des feux, Esteban Tuero harponne violemment la Tyrrell de Tora Takagi sur une manœuvre de dépassement hasardeuse dans la chicane. Passé quelques secondes plus tard sur les lieux de l’incident, « Schumi » crève sur les débris et déchape aussitôt alors qu’il amorce sa 31ème boucle au troisième rang. Contraint d’immobiliser sa F300 blessée dans l’herbe, Schumacher abandonne la mort dans l’âme et enregistre son deuxième échec mondial consécutif en rouge.
Andrea Noviello
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