Disponible en librairie depuis le 4 octobre dernier, « Grands Prix De la naissance de la course auto en France au retour du circuit Paul Ricard » retrace sur près de 200 pages la longue histoire unissant le monde de l’automobile à l’Hexagone. Épaulé dans sa tâche par le regard expert du photographe Bernard Bakalian, Henri Charpentier livre un très bel ouvrage mêlant anecdotes, coupures de presse, statistiques et documents inédits.
« Le grand mérite du livre d’Henri Charpentier et de Bernard Bakalian est de retracer avec minutie et authenticité l’histoire des Grands Prix automobiles en France, en n’oubliant rien d’essentiel des courses, des circuits, des voitures, des pilotes. » Habillement glissé dans la préface signée de sa plume, le compliment du président de la Fédération Internationale de l’Automobile, Jean Todt, synthétise avec une infinie justesse la richesse et la qualité d’une œuvre dont la genèse remonte au 5 décembre 2016, date de l’annonce officielle du tant attendu retour du Grand Prix de France au calendrier de la Formule 1.
Conscient de tenir là l’opportunité unique de rédiger un nouvel ouvrage autour de la catégorie reine (il est notamment l’auteur du livre « Monaco 60 Grands Prix de Légende »), l’ancienne voix des Grand Prix sur France Inter Henri Charpentier contacte le photographe attitré d’Alain Prost pendant sa carrière, Bernard Bakalian, et lui soumet après trois semaines d’une longue réflexion l’idée suivante : parler non seulement des quatorze éditions courues sur le circuit du Paul-Ricard, mais aussi de la création des courses automobiles en France et de l’irrésistible ascension d’une discipline amenée à devenir l’un des sports les plus médiatisés au monde. « Grands Prix De la naissance de la course auto en France au retour du circuit Paul Ricard » était né.
La France toujours en pole position
Distribué en librairie et sur le site des éditions Solar depuis le 4 octobre dernier, le livre du duo Charpentier-Bakalian emmène le lecteur dans un très instructif voyage à travers le temps, débutant son long récit par un tout aussi captivant retour à l’aube du XXème siècle. Non contente d’avoir commercialisé la première voiture au monde avec La Mancelle en 1878, la France s’impose en l’espace d’une vingtaine d’années comme le premier producteur mondial de véhicules motorisés (près de 50% du marché). Une position de force rapidement concrétisée par la création de la première course automobile (1894) reliant Paris à Rouen sur une distance de 126 kilomètres. Pionnier en la matière, le pays ne va alors jamais cesser d’innover, conservant de facto toujours un coup d’avance sur ses voisins européens et sur le futur géant américain.
Après l’invention du pneumatique démontable gonflé à l’air par Michelin (1895) et des phares par Louis Blériot (1897), après l’instauration du terme Grand Prix (1901) et l’avènement des courses sur circuit (1903), la France organise le premier Grand Prix Automobile de l’ACF (1906) au Mans, une épreuve remportée par le mécanicien des frères Renault Ferenc Szisz. Magnifiquement illustrée par des images d’archives, des unes de journaux et autres affiches publicitaires, cette première partie laisse ensuite place à une série de portraits toute aussi éclectique des sept tracés (Reims-Gueux, Rouen-les-Essarts, Charade, Le Mans Bugatti, Dijon-Prenois, Paul-Ricard et Magny-Cours) ayant accueilli la catégorie pinacle du sport automobile.
Les sept merveilles de l’Hexagone
« Le France est le pays qui a offert le plus de circuits à l’organisation du championnat du monde de F1 depuis sa création en 1950 », rappelle d’ailleurs avec justesse Henri Charpentier dans son introduction. Soucieux de faire découvrir (ou redécouvrir) aux lecteurs ces sept joyaux du sport automobile français, le journaliste aux 130 Grand Prix de Formule 1 entre 1975 et 1983 prend le pari audacieux, mais judicieux de « réduire » chacune des différentes pistes à un principal fait historique. Si Reims demeure ancré dans les mémoires collectives en raison des adieux officiels de la compétition du roi Juan-Manuel Fangio (1958), Rouen reste, pour sa part, douloureusement lié à la tragique disparition du Français Jo Schlesser (1968).
Hôte d’un seul Grand Prix de France (1967), le Mans tire, lui, sa renommée de l’inédit succès de Jack Brabham, le Néo-Zélandais devenant cette année-là le premier pilote de l’histoire de la catégorie reine à remporter une course au volant d’une machine qu’il a lui-même conçu. Concis, mais efficace dans son méticuleux travail de présentation, Henri Charpentier n’en n’oublie pas pour autant de rendre hommage à deux grandes figures du sport automobile, Jean-Pierre Jabouille et Michael Schumacher voyant respectivement leurs exploits à Dijon (première victoire d’un moteur turbo en 1979) et à Magny-Cours (huit succès du « Kaiser » dans la Nièvre en 1994, 1995, 1997, 1998, 2001, 2002, 2004, 2006) remémorés au plus grand plaisir des nostalgiques.
Prost roi du Ricard
Logiquement placé en dernier afin d’assurer une transition toute trouvée avec l’avant-dernier chapitre consacré aux pilotes ayant marqué de leur empreinte les quatorze éditions du Grand Prix de France disputées au Castellet, le circuit Paul-Ricard bénéficie d’un traitement tout particulier, l’ancien rédacteur en chef de France Inter prenant le soin de relater en détail l’aventure personnelle du célèbre créateur du pastis marseillais et son ambition de révolutionner la course automobile en circuit fermé. « Jusqu’en 1975, les circuits étaient extrêmement dangereux, reconnaît dans l’ouvrage Jean-Pierre Beltoise. Et puis Paul Ricard a fait un circuit. Il a su nous écouter tout en assurant une sécurité exemplaire tout au long du tracé. La crainte de se faire mal avait disparu. »
Revenu, le temps d’un court instant, en 2018 afin d’évoquer le grand retour de la manche française au calendrier et le succès, là encore historique, de Lewis Hamilton au Ricard 64 ans après le précédent triomphe d’une Mercedes sur le sol tricolore (Reims), Henri Charpentier se penche enfin sur les héros du tracé varois, retraçant les principaux faits d’armes (victoire inaugurale de Stewart en 1971, la réponse de Hunt à Lauda en 1976 ou encore le quadruplé tricolore Arnoux-Prost-Pironi-Tambay en 1982) des plus grands champions de la discipline. Salué comme il se doit pour ses exploits répétés sur le plateau du Beausset, le « Professeur » Alain Prost résume en préface du livre la valeur qu’il accorde à ses six succès à domicile (1981, 1983, 1988, 1989, 1990, 1993). « Ces victoires sont les plus belles de ma carrière. »
Andrea Noviello
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