Toujours cantonné à zéro point depuis l’ouverture de la saison, Pierre Gasly compte sur l’incertitude et les aléas d’un Grand Prix pas comme les autres pour enfin débloquer son compteur en 2024.
Son début de saison ressemble à un cauchemar. Relégué à un rang de simple faire-valoir par une A524 non seulement mal née, mais également complètement larguée par la concurrence sur le plan de la performance, Pierre Gasly a enchaîné les désillusions les unes derrière les autres en ce premier tiers de campagne 2024. Incapable de franchir le cap de la Q1 lors des quatre premières courses de l’année, le Français n’a jamais pu faire mieux qu’une modeste douzième position le dimanche après-midi (au début du mois de mai à Miami. Ndlr) en sept épreuves disputées jusque-là, se contentant bien souvent d’une futile bataille interne contre son voisin de garage chez Alpine Esteban Ocon. De nouveau discret le week-end dernier à Imola, il a dû se contenter d’une pâle seizième place en Émilie-Romagne, le natif de Rouen débarque sur le rocher avec l’envie de débloquer son compteur de points et d’enfin lancer un championnat 2024 démarré du mauvais pied.
Monaco est réputé pour être un circuit où le pilote peut faire la différence. Partant de ce postulat, avez-vous des chances de briller ce week-end dans les rues de la Principauté ?
J’ai envie de répondre oui, mais si on regarde les choses de manière objective (rires. Ndlr) … Quand tu compares un tracé classique du type Barcelone à Monaco, tu as potentiellement davantage de chances de réussir quelque chose de bien à Monaco que sur un circuit plus conventionnel. Et ce à voiture égale. Il existe ici une part de risques et d’incertitude que l’on ne retrouve pas ailleurs. Sur la majorité des circuits, le set-up de l’auto va être très similaire alors qu’à Monaco il est complètement différent. La voiture ne roule pas dans la même fenêtre optimale de fonctionnement. Cela favorise plus certaines machines que d’autres.
La saison dernière, Alpine avait créé la surprise en s’adjugeant la troisième marche du podium en terre princière. Une telle performance est-elle totalement illusoire cette année ?
Sans aucun doute. La saison dernière, on était capable d’être dans le jeu à certains moments et ce de manière plus régulière. L’écart a grossi entre-temps. Il paraît impossible à l’heure actuelle de répéter ce genre de performance. Un top dix me semble être une cible déjà beaucoup plus réaliste. Alors clairement cela ne sera pas simple. Mais je suis quelqu’un de très optimiste (sourire. Ndlr). C’est, aussi, ma vision des choses. J’aborde tous les week-ends avec cette mentalité. Même si sur le papier il est écrit que ce n’est pas possible, je me dis que rien n’est jamais impossible. Tout peut se passer. Pour pouvoir tirer le maximum, il faut adopter cette façon de penser. Je me dois de saisir n’importe quelle opportunité qui se présente à moi.
La pluie peut-elle être votre alliée samedi au moment des qualifications ?
J’aimerais bien qu’il pleuve, parce que cela chamboule un peu tout surtout ici à Monaco. En tant que pilote, il y a moyen d’aller chercher encore plus dans ces conditions que sur le sec. S’il ne pleut pas, on s’attend à ce que ce soit un week-end compliqué comme les autres. Mais il existe quand même cette part d’incertitude du fait de rouler sur un tracé aussi atypique que Monaco. Cela nous laisse espérer que quelque chose est tout même faisable et ce quelque soit les conditions en piste.
« McLaren constitue un très bon exemple selon moi parce qu’ils ont montré à tout le monde qu’en l’espace de douze mois, ils pouvaient passer d’une voiture qui était nulle part à une auto capable de gagner des courses. Aujourd’hui, ils se battent pour des victoires »
L’écurie a effectué pas mal de progrès depuis l’ouverture du championnat à Bahreïn. À quoi imputez-vous principalement cette progression dans la hiérarchie ?
À la réduction du poids de l’auto et aux évolutions qui ont apporté un peu plus de performance. L’équipe de piste est bonne. On arrive à bien optimiser les outils dont nous disposons à l’heure actuelle. Le déficit se concentre sur la voiture en elle-même. Les pièces ne sont pas dessinées pas les ingénieurs présents sur les circuits, mais par ceux qui bossent à l’usine. Un important travail est actuellement mené là-bas afin de prendre la bonne direction. On doit, aussi, prendre des risques sur la voiture pour pouvoir obtenir plus de cette saison difficile.
L’A524 vous convient-elle un peu mieux désormais ou reste-t-elle une machine capricieuse à piloter ?
Il y a quand même du mieux, mais plusieurs limitations perdurent. La voiture ne nous donne pas certaines choses. Je n’ai, par exemple, pas assez de train avant que ce soit en plein milieu du virage ou à la corde. Je suis, également, obligé d’être beaucoup plus progressif sur la traction alors que j’aime bien être assez agressif sur les réaccélérations. Il n’y a pas assez de soutien sur le train arrière. Aujourd’hui, la voiture n’est pas capable de nous donner certaines choses ce qui fait qu’après avoir essayé au début, on est obligé de s’ajuster au fur et à mesure que cela ne passe pas.
Comme vous en début d’année, McLaren était totalement larguée à l’entame de la saison 2023 avant de brutalement revenir sur le devant de la scène à mi-championnat à la faveur d’évolutions très efficaces. Croyez-vous pouvoir vous en inspirer ?
McLaren constitue un très bon exemple selon moi parce qu’ils ont montré à tout le monde qu’en l’espace de douze mois, ils pouvaient passer d’une voiture qui était nulle part à une auto capable de gagner des courses. Aujourd’hui, ils se battent pour des victoires ! La Formule 1 est un sport où les progrès peuvent être lents, mais d’un autre côté quand on met le doigt sur la bonne solution les choses peuvent aussi aller très vite.
« Il fallait changer la voiture de l’année dernière pour la simple et bonne raison qu’elle était arrivée à un plafond de performance. Le choix de changer était le bon. Pas la direction dans laquelle on a été. C’est malheureux, mais plein de choses positives se passent actuellement dans l’équipe »
David Sanchez a été nommé au poste de Directeur Technique Exécutif de l’écurie au début du mois de mai. Ressentez-vous déjà les effets de son arrivée chez Alpine ?
Il a énormément d’expérience. Bien sûr, on a déjà beaucoup parlé ensemble. On a, notamment, pas mal échangé sur son vécu et ce qu’il a pu connaître dans le passé. Outre les retours techniques que l’on a partagés, je lui ai également donné mon sentiment sur ce qui me manque sur la voiture et sur des choses différentes que j’ai pu observer par rapport à d’autres monoplaces du plateau. De nos discussions, il est sorti pas mal de choses intéressantes. Maintenant, il faut voir dans quelle mesure et dans quel laps de temps il va vraiment pouvoir avoir un impact sur l’auto. On est quand même déjà à la fin du mois de mai. Est-ce que ce sera sur la machine de 2024 ou plutôt sur celle de 2025 ? Encore une fois, il y a déjà des choses très positives. J’espère simplement que certaines de ses idées pourront se voir sur la voiture avant la fin de l’année.
L’écurie semble pas mal tâtonner depuis le début de la saison pour trouver le mal qui ronge l’A524. David Sanchez a-t-il pu mettre le doigt sur ce qui ne fonctionne avec cette voiture ?
Je pense avoir une bonne idée de ce qui ne fonctionne pas sur cette machine. Maintenant, toute la difficulté est de réussir à trouver une parade à ce problème. On sait ce qui ne marche pas, mais ce n’est pas comme s’il existait qu’une autre direction dans laquelle aller. Toute la question est de savoir quelle option tu dois privilégier à l’avenir. Vu nos résultats, je suis capable d’identifier ce qui ne fonctionne pas avec l’auto. Il y a plein de choses sur lesquelles j’ai personnellement des idées. C’est assez clair et précis dans mon esprit. Avec David, il y a des choses qui collent et qui ont du sens par rapport à ce que lui aussi a vu. Après, il va encore une fois falloir voir si des changements sont possibles dans les trois ou quatre prochains mois ou s’il faudra patienter pour cela jusqu’à la voiture de la saison prochaine.
Avec le recul, vous dites-vous qu’Alpine a fait le mauvais choix en changeant de manière aussi radicale la philosophie de sa voiture cette année ou l’écurie devait-elle obligatoirement en passer par là compte tenu du plafonnement de performance atteint par le précédent modèle ?
Il fallait changer la voiture de l’année dernière pour la simple et bonne raison qu’elle était arrivée à un plafond de performance. Le choix de changer était le bon. Pas la direction dans laquelle on a été. C’est malheureux, mais plein de choses positives se passent actuellement dans l’équipe. Que ce soit à Enstone, à Viry-Châtillon, ou encore dans la manière de gérer en piste avec les ingénieurs que l’on a. Malheureusement, tous ces changements positifs sont masqués par un manque de performance d’une voiture mal née. Cela arrive de produire des autos mal nées, mais il est ensuite important de réagir de la bonne manière. Les prochains mois vont, dans cette optique, être cruciaux pour nous. Mais de ce que je vois, plein de choses positives se passent ce moment. J’espère donc que l’on aura de nouvelles pièces sur la voiture dans un avenir proche.
Propos recueillis par Andrea Noviello
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