Privé de roulage lors des libres 1 en raison d’une rupture de sa boîte de vitesses, Charles Leclerc a brillamment surmonté les écueils d’un vendredi particulièrement difficile pour décrocher le chrono de référence lors des qualifications du Grand Prix de Singapour. Souverain en Q2 et en Q3, le Monégasque signe sous les projecteurs de Marina Bay sa troisième pole position consécutive depuis Spa-Francorchamps.
La Belgique et l’Italie ne devaient représenter qu’une parenthèse dorée dans la saison, jusque-là, inégale du nouveau petit chouchou des tifosis. Libérateur d’une Scuderia Ferrari (trop) longtemps sevrée de victoires, Charles Leclerc n’aurait, pourtant, jamais dû se mêler à la lutte pour la pole position sur le si tortueux tracé de Marina Bay. Si la SF90 avait logiquement fait merveille entre ses mains dans les interminables lignes droites de Spa-Francorchamps et de Monza, la dernière-née des ateliers de Maranello était promise au supplice dans les enchaînements serrés et particulièrement traîtres du tracé de Singapour. Imaginée autour d’un concept favorisant une faible traînée aérodynamique, la création de Mattia Binotto et d’Enrico Cardile était censée mordre la poussière face aux autrement plus « chargées » Mercedes et autres Red Bull. Résolument pessimiste quant à ses chances de surfer sur ses magistraux succès belges et italiens au moment de son arrivée sur les terres de l’ancienne colonie britannique, le Monégasque n’imaginait sans doute pas alors pareil retournement de situation.
Trahi par sa boîte de vitesses en libres 1, le pilote Ferrari accusait un très handicapant déficit de roulage sur ses adversaires directs à l’issue d’une première journée où il fut bien incapable de trouver l’équilibre adéquate de sa monoplace. Relégué à plus d’une seconde du chrono de référence établi par Lewis Hamilton, Leclerc aurait ainsi pu courber l’échine et se contenter du service minimum. Mais c’eût été mal connaître la force de caractère et l’envie de vaincre du petit prodige de la Principauté. Persuadé de disposer d’une vraie marge progression, le protégé de Nicolas Todt a redoublé d’efforts dans la nuit de vendredi à samedi, analysant des heures durant les datas de sa machine en compagnie de ses ingénieurs. Récompensé de son travail de sape par le meilleur chrono des libres 3, le fer de lance de la Ferrari Driver Academy a confirmé son inattendu regain de forme en qualification. Crédité d’une seule tentative en Q1, le Monégasque a ensuite fait parler la poudre en Q2 et en Q3 pour arracher, au prix d’une dernière tentative de toute beauté, sa troisième pole position consécutive depuis Spa.
« J’ai bien failli perdre la voiture »
« Je suis vraiment heureux, savoure le pilote flanqué du numéro 16 à sa descente de voiture. On pensait que ce circuit serait difficile pour nous, mais le travail réalisé par toute l’équipe a été incroyable. On a amené de nouvelles pièces et elles ont très bien fonctionné. Mon tour pouvait sembler bon de l’extérieur, mais j’ai connu plusieurs moments chauds où j’ai bien failli perdre la voiture. » Devancé par son coéquipier Sebastian Vettel à l’issue d’une première tentative en Q3 de bonne facture (il se classe deuxième à trois dixièmes et demi de l’Allemand), Leclerc a attaqué son deuxième run le couteau entre les dents, comme en témoigne sa première (grosse) chaleur en sortie du virage 3. Pas franchement échaudé par cette alerte sans conséquences, le pilote Ferrari a poursuivi son effort, quitte à de nouveau se faire peur après le virage de Singapore Sling. Passé, encore une fois, tout proche de la correctionnelle, le petit prodige de la Scuderia verra son agressivité récompensée par un cinquième chrono de référence (1’36’’217) dans l’exercice de la vitesse pure.
Autre satisfaction et non des moindres : en dominant une troisième fois consécutive la séance qualificative, le fer de lance de la FDA inflige un nouveau revers de taille à son coéquipier Vettel et se place dans les meilleures dispositions avant d’aborder une course où les opportunités de dépassement se feront rares ce dimanche. « Doubler ici n’est clairement pas une sinécure, corrobore le champion 2016 de GP3. Le départ sera donc crucial. J’espère simplement que ce sera un Grand Prix excitant. » Battu sur le fil par Lewis Hamilton et Max Verstappen au lendemain de ses deux premières pole positions en carrière (Bahreïn et Autriche), Leclerc avait, par la suite, parfaitement su convertir sa jolie performance du samedi en triomphe le dimanche. S’il venait à faire retentir l’hymne monégasque sur le podium de Singapour, le protégé de Nicolas Todt entrerait un peu plus encore dans l’histoire de Ferrari en devenant le premier pilote de la Scuderia à s’imposer trois fois consécutivement depuis sa majesté Michael Schumacher en 2006 (États-Unis, France, Allemagne). Sacré défi.
Andrea Noviello
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