Sacré champion du monde le 27 novembre dernier à Abou Dhabi, Nico Rosberg a annoncé son désir de mettre fin à sa carrière en Formule 1. Lassé par des années de sacrifices, l’Allemand quitte la catégorie reine après onze saisons passées au plus haut niveau pour se tourner vers sa vie de famille.
Ce ne devait être qu’une cérémonie classique. Une soirée dans laquelle la Fédération Internationale de l’Automobile remet, comme chaque hiver, ses distinctions annuelles aux différents pilotes sacrés dans leurs disciplines respectives. Cela aura finalement été beaucoup plus qu’une banale remise des prix. La faute au tout frais champion du monde de Formule 1 Nico Rosberg. À peine rentré d’une opération promotionnelle en Malaisie, l’Allemand a annoncé, à la surprise générale, son souhait de mettre un terme à sa carrière au plus haut niveau du sport automobile. Un choix mûrement réfléchi pour celui qui sera, enfin, parvenu à battre cette saison son ancien ami d’enfance Lewis Hamilton.
« En 25 ans de carrière en sport automobile mon seul but a toujours été de devenir champion du monde de F1 un jour, clame le néo-retraité des circuits. J’ai dû consentir d’énormes sacrifies pour atteindre cet objectif. Aujourd’hui, j’ai gravi la montagne, je suis arrivé au sommet. C’est un sentiment délicieux. J’éprouve une très profonde gratitude envers tous ceux qui m’ont soutenu tout au long de la route et qui ont rendu ce rêve possible. » Sacré au bout du suspense le 27 novembre dernier à Abou Dhabi, Nico Rosberg a clôturé de manière quelque peu impromptue une carrière en Formule 1 qui aura longtemps tardée à décoller. Non pas que le futur ex-pilote Mercedes manquait de talent. Son entrée fracassante à Bahreïn (il décroche les deux points de la septième place et le meilleur tour en course) démontre même le contraire.
« Il a gagné le respect de la discipline »
Mais l’Allemand n’a, jusqu’à l’introduction des motorisations hybrides en 2014 tout du moins, jamais pu s’appuyer sur une auto en mesure de jouer la gagne à la régulière. Cantonné à de trop rares exploits (il frôle la victoire lors du Grand Prix de Singapour en 2008) chez Williams, le natif de Wiesbaden a dû attendre son transfert chez Mercedes pour enfin donner la pleine mesure de son talent. Après avoir, assez facilement, pris la mesure de son illustre compatriote Michael Schumacher lors de leurs trois années communes à Brackley (2010, 2011 et 2012), Rosberg s’est révélé tout aussi coriace face à son ancien rival préféré en karting Lewis Hamilton. Battu aux points lors de son premier affrontement avec le Britannique en 2013, il compte néanmoins un succès de plus (2) que l’ancien protégé de Ron Dennis cette année là, le champion du monde 2016 a ensuite laissé passer deux chances énormes de coiffer la couronne mondiale les saisons suivantes.
Si beaucoup ne se seraient pas remis de pareilles désillusions, Rosberg va au contraire puiser dans ces échecs une nouvelle source de motivation. « Nico a toujours eu cette incroyable capacité de pouvoir rebondir de manière inspirée même après des temps difficiles, dévoile son dernier patron en F1 Toto Wolff. Il allie une combinaison vraiment spéciale entre talent naturel et esprit de combat. Il a gagné le respect de la discipline avec sa ténacité et son élégance sous la pression. » Au plus bas psychologiquement au soir de sa bourde d’Austin l’an dernier, le pilote Mercedes partit bêtement à la faute alors qu’il menait la course offrant sur un plateau la victoire et le titre à Hamilton, Rosberg rebondit comme toujours au moment où on l’attendait le moins. En alignant trois succès d’affilée à la fin de l’exercice 2015, l’Allemand posa les fondations de son futur triomphe.
« Cette saison a été extrêmement difficile »
Quatre victoires de rang viennent étayer ses ambitions avant que le rouleur compresseur Hamilton ne se mette en marche à Monaco. Moins dans le coup pendant l’été, hormis lors de son week-end parfait en Azerbaïdjan, le fils de Keke accepte de faire le dos rond le temps de trouver un second souffle. Il surviendra finalement au retour des vacances à Spa-Francorchamps. Profitant des multiples pénalités infligées à son coéquipier Hamilton, Rosberg renoue avec la victoire et rassoit sa suprématie sur ce championnat 2016. Deux autres succès suivront en Italie et à Singapour avant que le Grand Prix du Japon ne fasse, définitivement cette fois, basculer la balance en sa faveur. « Gagner à Suzuka m’a permis d’avoir mon destin entre les mains, explique le pilote flanqué du numéro 6. La pression s’est nettement accrue à partir de ce moment-là et j’ai commencé à envisager un départ de la F1 si d’aventure je venais à décrocher le titre. »
Placé dans une situation à la fois confortable et stressante, l’Allemand choisit alors d’adopter une approche précautionneuse pour les quatre dernières courses. Quand son voisin de garage chez Mercedes enfile les succès comme des perles, le natif de Wiesbaden se contente d’aligner les deuxièmes places. Bien que dénuée de panache, la tactique du fils de Keke fonctionne à merveille. Rosberg empoche le titre suprême au terme d’un dernier Grand Prix particulièrement éreintant nerveusement. « Cette saison a été extrêmement difficile, avoue le pilote de la firme à l’étoile. Après la grande déception des deux dernières années, j’ai tout donné et je n’ai rien laissé au hasard. Je me suis battu comme un fou. Mes précédents échecs ont élevé ma motivation à un niveau encore jamais atteint. J’y ai mis toute mon énergie. Mais je ne voulais pas revivre ça en 2017. »
Visiblement vidé par onze années de sacrifices en Formule 1, Rosberg a donc décidé de définitivement tourner la page de sa carrière en sport automobile pour se consacrer pleinement à sa vie de père de famille. Une décision certes courageuse, mais qui vient quelque peu ternir l’éclat d’un premier sacre pourtant acquis de très haute lutte face à Hamilton. En choisissant volontairement d’esquiver un nouveau duel au sommet avec son désormais ancien coéquipier chez Mercedes, l’Allemand prive son éternel rival d’une véritable revanche en 2017. Ce départ précipité de celui que le paddock surnommait « Britney » lors de ses débuts dans la discipline accrédite surtout la thèse défendue depuis longtemps par de nombreux observateurs : celle d’un champion du monde en puissance, mais aussi d’un pilote trop lisse pour laisser une empreinte indélébile dans l’histoire de son sport.
Andrea Noviello
Poster un Commentaire