De nouveau plombé par une stratégie complètement ratée de la part de Ferrari, Charles Leclerc a manqué une énième occasion de convertir sa pole position en victoire lors du Grand Prix du Mexique, dix-huitième étape de la saison 2019 de Formule 1. Réduit à un rang de simple faire-valoir par ses deux passages aux stands, le Monégasque échoue à une triste quatrième place au terme d’une course sans relief.
La pénalité méritée de Max Verstappen (le Néerlandais refusant de lever le pied dans son dernier tour rapide en Q3 malgré la présentation d’un double drapeau jaune au niveau de la courbe Mansell) l’avait propulsé au rang de favori. Deuxième, à la régulière, d’une séance qualificative qui avait de nouveau vu les Ferrari faire mordre la poussière aux redoutables Mercedes dans l’exercice du tour chronométré, Charles Leclerc pouvait légitimement se satisfaire des malheurs de son meilleur ennemi. Le pilote Red Bull mis en hors-jeu par sa propre arrogance, le champion 2017 de Formule 2 se voyait, ainsi, offrir une opportunité en or de renouer avec le succès sur un tracé de Mexico où jamais la Scuderia n’était encore parvenue à triompher depuis le retour au calendrier de la manche mexicaine en 2015. Élevé sur la première place de la grille de départ par le recul de trois places infligé à Verstappen, le protégé de Nicolas Todt devait, avant tout, soigner sa mise en action pour espérer remporter les lauriers au terme des 71 tours de ce Grand Prix du Mexique.
Contrairement à Sotchi ou plus récemment à Suzuka, l’enfant prodige de la Principauté n’avait, cette fois, pas tremblé au moment de lâcher les 1000 chevaux de son pur-sang italien au signal du starter. Au contraire, le pilote Ferrari s’était montré intraitable, conservant d’une main de fer les rênes d’une course qu’il comptait bien faire sienne. Sécurisé par la présence derrière lui de l’autre monoplace rouge de Sebastian Vettel, Leclerc avait ainsi toutes les cartes en main pour rafler la mise à Mexico et mettre fin au règne de Verstappen (victoire en 2017 et 2018) sur les terres des frères Rodriguez. Mais c’était sans compter sur une nouvelle bourde stratégique de la part des hommes de Maranello. Après la farce des qualifications monégasques (l’équipe italienne jugeant inutile de renvoyer Leclerc en piste malgré l’amélioration constante de la piste en Q1), les ratés de Montréal, du Red Bull Ring et de Budapest (Ferrari stoppant toujours Leclerc à contre-temps) ou encore le couac de Singapour (Vettel se jouant de Leclerc au stand grâce à un undercut très discutable), la Scuderia s’est, de nouveau, fourvoyée en calquant sa stratégie sur celle d’Alex Albon et en misant, à tort, sur deux passages par les stands.
Ferrari se rate sur toute la ligne
« Lors des derniers week-ends et encore aujourd’hui, la stratégie n’a pas été bonne, consent le Monégasque finalement quatrième d’une course remportée par Lewis Hamilton. J’aurais toutefois dû demander quelque chose à la radio et être plus décisif dans les décisions afin d’aider l’équipe à prendre la bonne option. Seb (Vettel) a su le faire. Je dois donc en tirer les leçons. J’espère que cela viendra avec le temps. » Focalisé sur le seul objectif de virer en tête dans le premier virage, Leclerc exécute un envol quasi-parfait à l’extinction des feux, emmenant dans son sillage l’autre Ferrari de Vettel et la Red Bull d’un Alex Albon opportuniste. Sans doute piégé par des gommes médiums pas encore suffisamment en température, l’enfant prodige de la Principauté se rate à l’approche du virage 4, contraignant son coéquipier à monter sur les freins pour éviter un contact trop violent entre les deux monoplaces rouges. Légèrement heurté à l’arrière par « Baby-Schumi », le protégé de Nicolas Todt s’en tire à bon compte, ni lui ni Vettel n’ayant subi le moindre dommage dans l’incident. Rapidement en mesure de se mettre à l’abri de la zone DRS, le champion 2017 de Formule 2 doit pourtant attendre le 11ème tour de course pour voir son avance (1,6 seconde) sur son voisin de garage prendre une portée un peu plus significative.
Progressivement en mesure de se détacher de la machine sœur de Vettel, Leclerc est pourtant appelé à son stand dès la 16ème boucle afin de couvrir la tentative « d’undercut » d’Alex Albon. Il l’ignore encore, mais ses espoirs de succès en terre mexicaine viennent de s’envoler. « Mon début de course s’était vraiment bien passé, assure le natif de Monaco en interview d’après Grand Prix. J’avais réussi à me maintenir en tête pendant tout le premier relais, mais ensuite j’ai été obligé de couvrir la stratégie d’Alex (Albon). En s’arrêtant aussi tôt, on a automatiquement basculé sur une stratégie à deux arrêts. » Renvoyé en piste en quatrième position derrière le trio Vettel-Hamilton-Bottas, le protégé de Nicolas Todt reçoit aussitôt l’ordre d’attaquer afin de combler son retard (18,6 secondes) sur la tête de course. Galvanisé par le message de son écurie, le champion 2016 de GP3 s’offre dans la foulée le meilleur tour en course, avant de subitement baisser de cadence. Mal à l’aise avec ses nouvelles gommes médiums, le fer de lance de la Ferrari Driver Academy éprouve les pires difficultés à remonter sur la Mercedes de Bottas. De 8,6 secondes au 18ème passage, l’écart entre les deux hommes ne tombe qu’à 6,7 secondes huit tours plus tard avant de se stabiliser autour des 6 secondes dans la 31ème boucle.
« Le second relais a vraiment été compliqué »
Remonté à la troisième place grâce au pit-stop d’Hamilton au 24ème tour, Leclerc va pourtant finir par retrouver du rythme grâce à une résurgence soudaine de ses gommes médiums. Homme le plus rapide en piste, le Monégasque ramarre le duo de tête et profite même d’une meilleure gestion du trafic pour recoller à trois secondes de Bottas. Débarrassé du Finlandais au 37ème passage avec l’arrêt au stand du pilote Mercedes, l’enfant prodige de la Principauté se croit alors de nouveau dans le match d’autant qu’une boucle plus tard son voisin de garage à Maranello, Vettel, stoppe lui aussi monter les pneus durs. De retour dans une position de pointe qu’il avait abandonné lors de son premier changement de gommes, le natif de Monaco comprend pourtant très vite que ce dimanche après-midi ne sera pas le sien. Lâché par ses gommes avant, le champion 2017 de Formule 2 repasse par la case stand dans le 44ème tour et abandonne ses derniers espoirs de victoire dans un arrêt rendu interminable (6,2 secondes d’immobilisation) par un pistolet récalcitrant à l’arrière droit. Rejeté à plus de dix secondes de la Mercedes de Bottas, « Carlito » se lance alors, sans grand espoir, dans une chasse au natif de Nastola.
Repassé devant Albon à la faveur de l’arrêt du Thaïlandais une boucle plus tard, Leclerc donne la pleine mesure de sa Ferrari sans toutefois parvenir à grignoter de gros dixièmes sur Bottas. Aidé dans sa poussive progression par des gommes accusant sept tours de moins au compteur de celles du Nordique, le fer de lance de la Ferrari Driver Academy parvient tout de même à effacer la quasi-totalité de son retard (il venait de revenir à 1,5 seconde de la flèche d’argent) quand un freinage totalement manqué dans le virage 4 met définitivement fin à ses ambitions de podium au 59ème passage. Conscient qu’il n’aura désormais plus de fenêtre de tir, le pilote de la Scuderia assure une quatrième place certes frustrante compte tenu de sa position de départ, mais suffisante pour conserver la troisième place du championnat pilotes devant Vettel (236 points à 230). « C’est toujours décevant de s’élancer depuis la pole et de ne pas l’emporter, regrette la révélation de la saison 2018. Le second relais a vraiment été compliqué. À chaque fois que je m’approchais d’une autre voiture, la mienne surchauffait et je ne pouvais pas dépasser. Même avec un arrêt parfait sur la fin, je ne pense pas que l’on aurait pu obtenir beaucoup mieux aujourd’hui. »
Andrea Noviello
Poster un Commentaire