Spectateur distant du duel Vettel-Hamilton, Charles Leclerc a décroché une solide troisième place à l’occasion du Grand Prix du Canada. De nouveau freiné par une stratégie douteuse de Ferrari, le Monégasque conquiert malgré tout son deuxième podium de la saison et recolle à seize longueurs de Verstappen au championnat.
La veille en qualification, il n’avait été qu’un arbitre lointain du somptueux duel que se sont livrés Lewis Hamilton et Sebastian Vettel dans la course à la pole position. Réduit à un rang de simple sparring-partner sur les rives du Saint-Laurent, Charles Leclerc s’était juré de ne pas revivre pareil scénario ce dimanche à l’occasion du septième rendez-vous de la saison. Conforté dans son ambition par les prometteurs chronos réalisés sur les longs relais lors de la journée du vendredi, le pilote Ferrari avait même fini par croire à une réminiscence du scénario de Bahreïn, là-même où deux mois et demi plus tôt il s’était révélé aux yeux du paddock en damant le pion aux deux têtes les plus couronnées de la Formule 1 actuelle. Mais à l’inverse de Sakhir, l’enfant prodige de la Principauté n’a cette fois jamais été en mesure de faire des étincelles le dimanche après-midi.
Longtemps resté à porté de tir de la Mercedes du Britannique, il est même revenu à moins de 2,5 secondes du quintuple champion du monde avant l’arrêt au stand de ce dernier, le fer de lance de la Ferrari Driver Academy a finalement dû se contenter de jouer, de nouveau, les accessits sur le circuit Gilles-Villeneuve, la Scuderia décidant de repousser le plus tardivement possible son unique changement de pneus en prévision d’une éventuelle intervention de la voiture de sécurité. Relâché à plus de douze secondes d’Hamilton à l’issue de son pit-stop tardif, Leclerc n’avait dès lors plus rien à espérer d’un Grand Prix qu’il terminera en tout logique en troisième position. « Je suis plutôt satisfait de ma course aujourd’hui même si je l’ai passé en solitaire, déclare à l’arrivée l’ancien pilote Sauber. Je ne pense pas que l’on aurait pu obtenir un meilleur résultat ici. On a vraiment été rapide du premier au dernier tour. Je vais devoir maintenant me concentrer sur les qualifications, car en course mon rythme était très bon. »
Une course d’attente
Positionné juste derrière son coéquipier Vettel sur la grille, le Monégasque réalise un bon envol dans le sillage de son voisin de garage, mais se montre un peu trop respectueux vis-à-vis du quintuple champion du monde Hamilton dans le premier virage. Parvenu à se maintenir sans la moindre difficulté devant la Renault de Daniel Ricciardo, l’enfant prodige de la Principauté va en revanche avoir nettement plus de mal pour suivre la folle cadence imprimée par les deux hommes de tête. Repoussé à près de 4,5 secondes de la Ferrari sœur en l’espace de six tours, le pilote de la Scuderia choisit alors volontairement de se tenir à distance respectable de la Mercedes d’Hamilton devant lui dans l’espoir de préserver ses gommes médiums de toute usure excessive. Visiblement efficace, le travail de sape du champion 2017 de Formule 2 porte ses fruits, Leclerc augmentant progressivement sa cadence au moment où Ferrari lui annonce par radio un passage au plan B.
Prévenu des difficultés de son plus proche adversaire à maintenir ses gommes dans un bon état, le protégé de Nicolas Todt enchaîne les meilleurs tours en course, au point de revenir à 2,2 secondes du leader du championnat. Consciente de la menace, Mercedes rappelle Hamilton à son box dans le 29ème passage, offrant par la même occasion les commandes du Grand Prix au natif de Monaco. Soucieuse de ne pas mettre ses œufs dans le même panier, Ferrari décide alors de prolonger le relais du champion 2016 de GP3, misant sur une éventuelle entrée en piste de la safety-car. Maintenu en piste sept boucles de plus que son coéquipier Vettel, l’Allemand ayant de son côté effectué son changement de gommes obligatoire dans le 27ème tour, Leclerc rentre finalement monter les pneus durs à l’amorce du 34ème passage, non sans avoir au passage abandonner un temps conséquent sur les leaders (des 13,6 secondes d’avance qu’il a un temps possédé sur Vettel, il ne lui en restait que 5,3 secondes avant son pit-stop).
« J’ai attaqué sans savoir ce qu’il se passait devant »
Parfaitement exécuté par les mécaniciens de la Scuderia (2,3 seconde d’immobilisation), l’arrêt au stand coûte tout de même une place au Monégasque, le roublard Max Verstappen ayant habillement profité de l’aubaine pour se glisser en troisième position. Parti sur une stratégie décalée après ses malheurs des qualifications (il s’est élancé en gommes dures), le Néerlandais ne va toutefois pas opposer une grande résistance au pilote de la Ferrari, Leclerc se débarrassant sans difficulté aucune du nouvel enfant chéri de Red Bull dans la 36ème boucle. De retour dans le top 3, l’enfant prodige de la Principauté va alors répéter sa stratégie du premier relais. Persuadé d’avoir une carte à jouer en fin de course, le fer de lance de la Ferrari Driver Academy adopte pendant une bonne dizaine de tours un rythme inférieur aux capacités de sa SF90 avant de lâcher les chevaux à une quinzaine de boucles du drapeau à damier.
Distancé à près de 14 secondes d’Hamilton au 47ème passage, le pilote de la Scuderia amorce alors un spectaculaire retour qui va le voir effacer la moitié de son retard sur le Britannique. Finalement contraint de se contenter de la troisième marche du podium, Leclerc allait apprendre après le baisser du drapeau à damier que la pénalité infligée au vainqueur moral de cette septième manche du championnat Sebastian Vettel aurait pu lui offrir la deuxième place sur tapis vert. « Je n’étais pas du tout au courant, révèle la révélation de la saison 2018. J’ai attaqué sans savoir ce qu’il se passait devant. L’équipe a même voulu m’arrêter pour aller chercher le meilleur tour, mais j’ai refusé. Je voyais Lewis et Sebastian se battre donc je voulais absolument rester là au cas où quelque chose se passerait entre eux. Cette opportunité ne s’est, malheureusement, pas présentée. » Battu dans son duel en interne chez Ferrari, le Monégasque pourra tout de même retenir un aspect positif de son week-end canadien : en rééditant son meilleur résultat de l’année, il a repris cinq points à Verstappen dans la lutte pour la quatrième place du championnat.
Andrea Noviello
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