Course : Hamilton le bouquet final

Lewis Hamilton course Abu Dhabii 2018
Impeccable de bout en bout, Lewis Hamilton enlève sa 73ème victoire en F1 à Abu Dhabi.
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Seul gros bras à avoir profité de la neutralisation sous régime de voiture de sécurité virtuelle pour anticiper son changement de pneus, Lewis Hamilton a remporté d’une main de maître le Grand Prix d’Abu Dhabi, vingt et unième et dernière manche de la saison 2018 de Formule 1. Intraitable d’un bout à l’autre de la course, le quintuple champion s’adjuge au terme d’une nouvelle démonstration de force la 73ème victoire de sa carrière devant la Ferrari de Sebastian Vettel et la Red Bull de Max Verstappen.

En s’arrêtant dès la fin du 7ème tour alors que ses pneus ultratendres auraient, en théorie, dû l’amener beaucoup plus loin, Lewis Hamilton prenait un risque, pas énorme certes, de voir ce dernier Grand Prix de la saison lui échapper. En abandonnant volontairement à ses adversaires un leadership qu’il s’était construit au prix d’un envol parfaitement négocié et d’une entame de course sans la moindre fausse note, le pilote Mercedes offrait également à ses rivaux l’espoir de le voir enfin trébucher au cours d’un championnat où jamais le désormais quintuple champion du monde ne se sera laissé prendre à défaut. Si une mauvaise appréciation stratégique n’aurait en aucun cas suffi à assombrir l’exceptionnel exercice 2018 du fer de lance de la firme à l’étoile, elle aurait tout de même permis aux Vettel, Verstappen, Bottas et autre Räikkönen de croire en une possible faille dans l’armure quasi-indestructible du natif de Stevenage. Malheureusement pour eux, l’Anglais avait de nouveau vu juste en stoppant (bien) avant ses petits camarades de jeu.

Sorti perdant de son face-à-face viril avec Verstappen, Hamilton semblait pourtant perdre pied au moment où son coéquipier Bottas se chargeait de dicter le rythme au peloton. Ce n’était en réalité qu’un leurre destiné à abuser la concurrence. Volontairement décroché par les Red Bull, le Britannique a intelligemment attendu son heure et les arrêts respectifs de ses adversaires pour récupérer les rênes de la course dans la 34ème boucle et ne plus jamais les lâcher. Imperturbable en dépit de gommes affichant respectivement huit et dix tours de plus que celles de Vettel et de Verstappen, le pilote Mercedes a magistralement contrôlé l’avance qui était le sien pour s’en aller quérir un 73ème succès en carrière tout aussi bluffant. « Je suis si heureux, confie après l’arrivée le pilote flanqué du numéro 44. Je veux remercier tous ceux qui m’ont soutenu cette année. Ce fut un privilège et un honneur de me battre contre Sebastian (Vettel). La voiture n’était pas en grande forme après l’arrêt au stand, mais il s’est avéré que les ingénieurs avaient raison. Un grand merci à eux. »

Hulkenberg plus de peur que de mal

Impeccable au moment de s’extraire de sa position de pointe à l’extinction des feux, Hamilton conserve l’avantage de sa pole dans le premier virage, suivi de près par la Mercedes sœur de Bottas et le duo de chez Ferrari. Particulièrement efficace lors de ses précédentes mises en action, Charles Leclerc réussit un nouvel envol de toute beauté sous le soleil couchant de Yas Marina, le débutant de chez Sauber dépossédant avec fermeté Romain Grosjean de sa sixième place. Visiblement galvanisé par cette jolie entame, le Monégasque enchaîne par un second dépassement sur Daniel Ricciardo au moment même ou Grosjean envoie, involontairement, la Renault de Nico Hulkenberg valdinguer dans un terrifiant double tonneau. « C’était plus spectaculaire qu’effrayant, rassure l’Allemand. Je vais bien. Ma douleur, c’est la déception de ne pas avoir vraiment pu courir aujourd’hui. Il s’agit d’un simple incident de course. »

Neutralisé pendant trois tours derrière la voiture de sécurité, le temps de retourner la voiture du natif d’Emmerich et de libérer « Hulk » de son inconfortable position, le Grand Prix reprend ses droits à l’amorce du 5ème passage avec en tête de gondole un Lewis Hamilton bien décidé à ne laisser aucune miette à ses adversaires en ce soir d’ultime rendez-vous du championnat. Parfait dans sa gestion du restart, l’Anglais se détache d’entrée de son dauphin Bottas, laissant au bouillant Max Verstappen le soin de dynamiter le peloton. Tombé en neuvième position après un départ cauchemardesque, le pilote Red Bull entame sa folle remontée par un duel à couteaux tirés avec son bourreau du Grand Prix du Brésil, Esteban Ocon. Venu à bout de la résistance coriace du Tricolore à l’issue de sa troisième tentative, le Batave s’octroie une huitième place qu’il compte bien bonifier à la faveur de son choix pneumatique (il s’est élancé en hypertendres) agressif.

Une stratégie sous VSC à double tranchant

Parti, tout comme Verstappen, avec la gomme la plus tendre des Pirelli, Leclerc efface, de son côté, la Ferrari de Räikkönen, grimpant à une incroyable quatrième place dont il ne pourra hélas pas bien longtemps se délecter. Trahi par une défaillance électrique alors qu’il s’apprêtait à entamer son 7ème tour de course, le Finlandais immobilise sa SF-71H en pleine ligne droite des stands, contraignant la direction de course à activer la très controversée virtual safety-car. Le sort de cette vingt et unième manche de la saison vient de basculer. Trop heureuse de pouvoir bénéficier d’un arrêt quasiment gratuit, la vitesse étant limitée sur tout le circuit en cas de voiture de sécurité virtuelle, Mercedes anticipe le changement de pneus de son leader Hamilton en appelant le Britannique à son box dans la 8ème boucle. Sans doute influencée par le stratagème des hommes de Toto Wolff, Sauber imite l’écurie championne du monde en rapatriant aussitôt l’épatant Leclerc dans la voie des stands.

Si la stratégie se révèle efficace dans le cas du Britannique, Hamilton ressortant au cinquième rang non loin de Verstappen, elle va en revanche s’avérer catastrophique pour le Monégasque. Appelé à son box alors que la VSC est sur le point de s’arrêter, Leclerc perd tout le bénéfice de son excellente entame de course, chutant à une lointaine quatorzième position qu’il va toutefois rapidement s’empresser de quitter. Revenu à coup de dépassements (sur Stroll et Magnussen) derrière la McLaren du néo-retraité Fernando Alonso, Leclerc bute près quinze tours sur l’Espagnol, anéantissant ainsi ses derniers espoirs de conquérir la place de meilleur des autres. Propulsé sur le devant de la scène par les arrêts conjugués de Vettel (16ème tour), Bottas (17ème tour) et de son coéquipier Verstappen (18ème tour), Ricciardo croit alors pouvoir rejouer le si brillant coup de poker qu’il avait interprété en Chine. Hélas pour l’Australien, l’arrivée de la pluie au 24ème passage et le soudain regain de forme d’Hamilton vont rapidement couper court à ses espoirs de victoire.

Le fantôme de Bottas

Encore nanti d’une confortable marge de 6,5 secondes sur le Britannique avant l’ondée, « Smiling » voit l’écart qui le sépare du quintuple champion du monde fondre en l’espace d’une dizaine de tours. Finalement appelé à son stand à la fin de la 33ème boucle, Ricciardo abandonne non seulement la tête du Grand Prix à Hamilton, mais repart également derrière la Red Bull sœur de Verstappen. « La stratégie m’a éloigné des leaders, regrette le futur pilote Renault. Je ne sais pas si on avait vraiment le choix. Nous aurions pu nous arrêter plus tôt et garder notre position en piste. » Logiquement frustré par la tournure des événements, « Ricci » préfère pourtant ne pas abdiquer, un choix d’autant plus judicieux qu’à l’avant Bottas commence sérieusement à fléchir. Dépassé par Vettel au 35ème tour après une erreur au virage 5, le Finlandais enchaîne deux nouvelles bourdes dans les boucles suivantes qui vont, cette fois, profiter à l’opportuniste Verstappen.

Sautant sur l’occasion, Ricciardo élimine à son tour un Bottas en perdition totale dans le 39ème passage, s’octroyant un infime espoir de monter sur la troisième marche du podium pour sa dernière sortie sous la combinaison Red Bull. Parvenu à recoller à moins de deux secondes de son voisin de garage, l’Australien ne réussira cependant jamais à se montrer réellement menaçant dans une fin de course particulièrement pénible pour les pilotes français. Si Grosjean sauve quelque peu l’honneur du contingent tricolore en arrachant une neuvième place pratiquement inespérée après son mauvais choix stratégique (il a comme Leclerc et Hamilton pris le pari de s’arrêter sous VSC), Esteban Ocon (46ème tour) et Pierre Gasly (48ème tours) ne peuvent pas en dire autant, deux ruptures moteur à deux boucles d’intervalle venant abréger leur désolant dimanche après-midi. Grand bénéficiaire de ces pépins mécaniques, Fernando Alonso n’est pas beaucoup plus heureux, l’Espagnol achevant sa carrière en Formule 1 sur une frustrante onzième place dans la nuit étoilée d’Abu Dhabi.

Andrea Noviello

Carlos Sainz course Abu Dhabi 2018
Porté par une stratégie parfaite, Carlos Sainz signe une jolie 6ème place dans la nuit de Yas Marina.
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